vendredi 20 septembre 2013

This is Tonga - Jour 4

Vendredi 23 Aout 2013

Nage avec les baleines : tout vient à point à qui sait attendre... et attendre, et attendre.

Aujourd'hui, c'est le grand jour ! Nous allons nous baigner avec des baleines en plein océan Pacifique !
La journée commence tôt, le capitaine passe nous chercher en voiture à 7h30. Visiblement, il a eu le temps de se faire attaquer par les moustiques, il dit ne jamais en avoir vu autant au même endroit. J'en conclus donc que nous avons trouvé la seule guesthouse infestée de moustique et que le reste de l'île n'en compte pas autant. Sur le chemin du port, nous récupérons un autre aucklandais, Graham, l'incarnation du papi kiwi dans toute sa splendeur : un grand short, des sandales, des chaussettes, un grand chapeau et le visage couvert d'1cm de crème solaire.

Après 10 minutes à contourner tous les nids de poule, nous arrivons au "port" de Neiafu et nous embarquons avec Graham, Isi le guide, Andrew le capitaine, et 4 autres touristes. Dans le lot, il y a une grosse australienne et je pense "au moins voilà une baleine avec laquelle on se sera baigné". C'est pas très charitable.

Nous nous hissons tous tant bien que mal dans nos combinaisons et nous mettons les gaz. Comme promis, c'est le bateau le plus rapide et c'est vrai que ça décoiffe. Nous passons chercher le 8ème membre du groupe sur son catamaran puis nous partons à la recherche des baleines. Nous sommes répartis en 2 groupes de 4 et Isi nous explique que le premier groupe à repérer une baleine pourra aller dans l'eau d'abord. Je regrette qu'il n'ait pas dit "le premier groupe à crier 'baleine!'" parce que sinon, on n'aurait vite gagné.

Le capitaine nous amène au dernier endroit où des baleines ont été vues la veille et ainsi commence une longue, longue vigie. Isi nous explique qu'on repère les baleines grâce à leur souffle, à une nageoire levée ou en repérant leur queue quand elles plongent. Moi j'imagine un souffle de la taille d'un geyser mais il n'y en a aucun en vue.

Enfin, après plus de 40 minutes à scruter les flots, le groupe avant repère un souffle et nous nous mettons en route. J'ai beau chercher dans la direction indiquée, je ne vois absolument rien. C'est normal, la baleine vient respirer 3 fois puis replonge pour environ 15 minutes. Nous voila donc à attendre un quart d'heure de plus pour retrouver notre baleine. La journée promet d'être longue.

Petit jeu : saurez-vous repérer une baleine grise, sur fond gris, avec la mer grise ? L'homme à droite, c'est Isi le guide tongien. 

Solution : on voit le souffle puis le dos de la baleine à 0'07" puis à 0'42".

La baleine finit par remonter respirer puis replonger. Isi se glisse alors dans l'eau et nage jusqu'à l'endroit où elle vient de disparaître puis la repère. Il fait signe à l'autre groupe de le rejoindre. C'est un grand mâle venu dans un coin peu profond pour chanter. Il plonge à une vingtaine de mètres puis chante la tête en bas pendant 15 minutes avant de remonter respirer. Andrew explique que lorsque la baleine remonte, il faut tous être du même côté pour qu'elle nous voit. Normalement, elle remonte, se tourne pour regarder les nageurs de près et continue pour respirer. Manque de chance, celle-ci n'a pas l'air de vouloir les regarder et s'éloigne avant de remonter.

Lorsque la baleine s'est éloignée, le groupe remonte sur le bateau et nous partons à sa suite. C'est assez facile de repérer l'endroit où elle a replongé grâce à d'énormes remous qui restent à la surface quelques minutes. Isi repère de nouveau le mâle et c'est à notre tour d'aller dans l'eau ! L'eau est très douce et les combinaisons aident bien à flotter. Nous restons immobiles au-dessus du grand mâle en l'écoutant chanter. L'eau est trouble à cause de toutes les pluies des jours précédents donc nous distinguons à peine le bout de la queue. C'est quand même extraordinaire et le chant résonne très fort dans nos ventres. On ne peu pas dire que ce soit très mélodieux mais c'est carrément magique ! Enfin la baleine remonte, un moment un peu effrayant lorsque nous voyons un monstre de la taille d'un bus se redresser juste en dessous de nous. Mais comme pour l'autre groupe, la baleine s'éloigne sans venir nous regarder de près.


De nouveau nous remontons et nous repartons la chercher mais cette fois la baleine a plongé plus profond. Isi pense qu'on la dérange alors nous la laissons tranquille pour chercher une autre baleine. C'est reparti pour une longue vigie. Au moins, je sais que nous ne cherchons pas un geyser mais un tout petit plumeau d'eau, difficilement discernable sur fond de ciel gris. Nous retrouvons un mâle plus loin mais le temps d'atteindre le point de sa plongée, les remous ont disparu. Nous attendons encore 15 minutes. Finalement, il ressort et Isi va à sa recherche. Le premier groupe le rejoint mais après moins que 5 minutes, la baleine plonge plus profond et disparaît. Celle-là non plus ne veut pas de nous, on s'en va.

Avec tout ça, il est midi et pendant que nous avançons tranquillement entre les îles inhabitées, nous prenons notre déjeuner. Des sandwich, des chips de kumara (kumala en tongien) et des fruits frais. Pendant ce temps, le temps s'est bien dégagé et il y a peu d'ombre sur le bateau, mes jambes commencent sérieusement à cuire malgré la crème solaire. Après manger, nous repartons à la chasse à la baleine. Je ne sais pas comment les japonais font pour en tuer autant, c'est vachement dur à trouver malgré leur taille.

Un peu plus tard, nous en retrouvons une, encore un grand mâle. Le temps d'arriver sur place, il a disparu. Il ne reparaît que 20 minutes plus tard et bien plus loin que prévu. Nous repartons à sa poursuite. La baleine ressort plus loin puis replonge mais sans faire de remous, ce qui complique beaucoup le repérage pour Isi. Au bout de plusieurs tentatives, on se rend à l'évidence: la baleine ne plonge pas pour chanter, elle est en train de voyager, ce ne sera pas encore celle-ci avec laquelle on pourra se baigner. Heureusement, elle suit la même route que nous et pendant près de 10 minutes, nous avançons côte à côte, ce qui nous permet de l'observer en toute tranquillité et ce n'a pas l'air de la déranger. Elle fait au moins 2 ou 3 fois la taille de notre bateau, c'est extraordinaire. Lorsqu'elle s'enfonce un peu dans l'eau, on ne distingue plus qu'une immense forme sombre qui glisse à quelques mètres de nous. Pourvu qu'elle vienne pas donner un coup de tête ou de queue dans notre bateau !

Finalement, on repère un nouveau plumeau à l'horizon et nous en prenons la directions. C'est le même jeu de patience qui recommence. On voit la baleine, le temps qu'on arrive, les remous ont disparu, on attend encore un quart d'heure, on retrouve la baleine, Isi ne la trouve pas, on attend encore, etc. L'après-midi avance bien, on a chaud, la combinaison nous étrangle un peu, mes bras brûlent à leur tour, on attend, on attend.

A chaque fois qu'on repère une baleine, l'excitation monte en flèche, on saute dans nos palmes, masque et tuba, puis la baleine disparaît avant même qu'on puisse entrer dans l'eau et on enlève nos palmes, masque et tube en jurant que c'est bien la dernière fois qu'on fait ça. Puis une baleine apparaît et on ressaute dans nos palmes de nouveau tout excités.

Vers 17h, nous n'avons toujours pas trouvé de baleine sympathique, j'ai les bras et les mains sévèrement brûles, je veux rentrer à la maison, bouhou. De nouveau, je jure de ne plus retourner dans l'eau, baleine ou pas baleine, et j'enlève ma combinaison. Un peu plus tard, le capitaine déclare, "this whale sucks, let's go home". On sent qu'il est très déçu de ne pas nous avoir offert de meilleures baignades mais nous sommes quand même contents de prendre le chemin du retour .

Et là... au loin devant nous... pas un, mais trois plumeaux, dont un petit, s'élèvent au dessus de l'eau! Andrew sautille de joie et fonce vers les plumeaux. Nous réalisons l'approche finale très doucement, en faisant de larges cercles. C'est bien ce qu'on a vu, une mère, un petit et un escort sont en train de se reposer près d'une falaise. Isi se glisse à l'eau sans faire de bruit et les repère. Il fait un signe et nous nous glissons tous aussi furtivement que possible. Il faut être très discret et rester à une bonne distance pour ne pas les effrayer. Le ciel s'est bien assombrit avec la fin de la journée et je ne distingue que les deux adultes immobiles. L'un est vertical avec la tête en haut, l'autre est horizontal, la tête au même niveau que le premier. Sans ma combinaison, je tremble de la tête au pied mais il est hors de question de sortir de l'eau. C'est presque difficile de se souvenir de respirer devant ce spectacle.

Une dizaine de minutes plus tard, les baleines commencent à bouger et cette fois, tout le monde retient son souffle. La baleine verticale remonte et s'incline, la baleine horizontale commence à avancer vers nous, et enfin je distingue une mini baleine qui s'agite autour des deux grandes. Les trois monstres passent doucement juste à côté de nous en nous regardant et vont respirer. Quand elles nous ont dépassés, nous tentons de les suivre à la nage, mais elles sont bien trop rapides, même sans avoir l'air de se presser.

Nous remontons dans le bateau et c'est à l'autre groupe d'y aller. On est tous complètement excités, on compare les prises de vue sur les appareils photos mais la lumière est trop faible. Il faudra se contenter de s'en souvenir. Lorsque l'autre groupe revient tout aussi excité, Andrew pense nous faire retourner dans l'eau mais Isi pense que ce n'est pas une bonne idée. Le grand mâle n'avait pas l'air d'apprécier notre présence et semblait pousser la mère et le petit loin de nous. Nous, on s'en fiche, on a des étoiles plein les yeux, on rentre avec le sourire jusqu'aux oreilles. J'attendrais bien encore 8 heures en plein soleil si c'était pour revoir un tel spectacle.

Nous n'avons donc aucune image des trois baleines mais j'ai trouvé de photos sur internet qui ressemblaient beaucoup à ce qu'on a vu.



Nous rentrons au port mais la journée est loin d'être finie. Nous attendons qu'Andrew aille ancrer le bateau dans la baie pour qu'il puisse nous ramener à la guesthouse. Comme il n'a pas de canot, il faudra qu'il rentre à la nage depuis le bateau. Heureusement, un de ses amis repère un canot sur la plage mais il n'a pas de pagaie. Aucun problème, il met le canot à l'eau et part en pagayant avec les mains. C'est hilarant de les voir pagayer avec les mains, les fesses dans leur mini-canot. La gérante de la compagnie nous explique que les gens laissent toujours les canots sur la plage mais sans pagaies parce qu'elles se font voler.

Isi et Andrew, avec notre super bateau
Après ce bon fou rire, nous reprenons la route. Alors que nous sommes sur une section sans nid de poule et donc à plus de 60km/h, des vaches déboulent du côté de la route. Andrew freine de toute ses forces et nous nous arrêtons à moins de 10cm d'une vache qui nous jette un regard vide. Nous repartons prudemment et rentrons sans plus d'incident à la guesthouse.

La journée n'est toujours pas finie puisque Isi et Lee sortent à un bal à Neiafu ce soir. Nous avons donc décidé de ressortir manger au seul restaurant "occidental" de Neiafu pour ne pas qu'ils aient à cuisiner pour nous. Nous partons tous avec Isi au volant pendant que Lee essaye tant bien que mal de finir de se coiffer et maquiller. Isi roule comme un fou et après l'épisode de la vache, on est à peu près sûr de mourir ce soir, mais non, nous arrivons entiers.

Le restaurant est réputé pour ses pizzas et j'ai assez faim pour manger une baleine entière. Avec un petit cocktail pour fêter la journée, cela semble parfait. Sauf que le cocktail était peut-être un peu trop chargé ou la pizza pas si fraîche, et 20 minutes après dîner, alors que nous marchons dans les rues de Neiafu, j'ai très très mal au ventre. Je ne fais pas de dessin mais nous avons tout juste le temps de retourner au restaurant et atteindre les toilettes avant la catastrophe.

Une misérable demi-heure plus tard, Isi et Lee passent nous chercher et nous rentrons car la journée est enfin finie !

(à suivre... peut-être)

dimanche 8 septembre 2013

This is Tonga - Jour 3

Jeudi 23 aout 2013

Aujourd'hui, rien de prévu pour moi, c'est Christophe qui va passer une journée à faire de la plongée avec un groupe. Evidemment, le départ est à 7h donc pour ne pas faire préparer 2 fois un petit déjeuner à notre hôte, je me lève aux aurores pour petit-déjeuner avec Christophe. Pour une fois Malee n'est pas un pleine action avec l'un des chiens du voisinage. Une fois débarassée de Christophe, je retourne me coucher pour ne me réveiller qu'à 11h. Faut dire que je ne dors pas très bien la nuit. Il fait chaud, le lit est étroit et le matelas tellement mou que je glisse en permanence vers Christophe. Et Christophe, il tient chaud.

Rien de spécial jusqu'au déjeuner, où Isi me prépare le meilleur fish and chips que j'ai jamais mangé. Avec une panure très légère autour de filets de snapper (le meilleur poisson du monde) et une sauce délicieuse pour tremper dedans. Isi a ajouté des branche de basilic à la forteresse de tortillons anti-moustiques. Ca sent bon mais ça ne marche pas franchement.

Après manger, je m'installe avec Lee qui entreprend de me raconter l'histoire du restaurant-guesthouse, ses projets, son boulot en Australie et la vie de famille à la tongienne. Je pense que pour ce qui est des relations familiales, "Les feux de l'Amour" et "Plus belle la Vie" trouverait à Tonga une inspiration illimitée : Isi a été précédemment marié (mariage arrangé) à une femme plus âgée qui avait menti sur son age. Ils ont la garde partagée d'un petit garçon qui a en fait été adoptée par la soeur d'Isi quand elle avait 17 ans. Mais comme elle était trop jeune et sans emploi, c'est eux qui garde le gamin. Enfin, c'est plutôt l'ex-femme d'Isi et elle refuse que le garçon reste dormir chez Isi et Lee de peur que Lee empoisonne le gamin. Isi lui même avait été donné par ses parents à un couple sans enfant, mais il s'est enfuit de chez eux pour rentrer chez ses parents. Et plein d'autre histoires dignes de feuilleton américain.

Christophe rentre vers 15h alors que je partage mon temps entre bouquiner à l'ombre et m'enduire d'anti-moustique. Tant que le produit est efficace, il n'y en a aucun qui vole autour de moi. Mais dès que Christophe arrive, puisqu'il ne craint pas les piqures, il ne met pas de produit et c'est de nouveau l'invasion. Sa plongée à l'air de s'être bien passée, il a juste heurté un corail et s'est écorché le pied. Il a aussi vidé la batterie de ma camera étanche et comme il n'y a pas d'électricité pour la recharger, je suis un peu contrariée.

Un peu plus tard, Isi passe nous offrir une noix de coco chacun qu'il décapite d'un coup de machette expert. Vous saviez que la noix de coco facilitait le transit intestinal ? C'est un peu le pruneau d'Agen des pays tropicaux sauf que c'est plus dur à mâcher. Bref, c'est super efficace.

Après cela, rien de bien passionnant. On bouquine sur la plage, on observe la nuit tomber malgré la couverture nuageuse, puis vient le diner. Isi teste une nouvelle technique pour chasser les moustiques. Il fait bruler des petites noix qui poussent dans un arbre voisin. Ca marche peut-être mais pas suffisamment pour me passer d'anti-moustique.
Vas-y, prends un air profond !
Après manger, le ciel s'est enfin dégagé et on découvre le ciel tel qu'il est sans pollution lumineuse. Après une vingtaine d'essais de réglages différents sur l'appareil photo, on obtient quelque chose de pas trop mal. Enfin, on va se coucher parce qu'une grosse journée est prévue demain : la baignade avec les baleines !


(à suivre)